20 févr. 2012

De l'image de François Bayrou

Le cas François Bayrou m'intéresse.
Pour plusieurs raisons mais principalement parce que je me retrouve dans nombre de valeurs que le MoDem incarne et parce que son incapacité à atteindre le second tour dans les sondages m'interpelle.

En effet, j'ai l'intime conviction, renforcée par l'environnement professionnel dans lequel j'évolue (la communication), qu'il y a deux raisons majeures (majeur ne signifie pas unique) pour lesquelles un candidat réussi de nos jours à atteindre le deuxième tour d'une élection présidentielle :

1. Le socle idéologique sur lequel il repose : ce socle définit la solidité de sa base militante, la force de pensée du mouvement et le potentiel d’adhésion informelle de nouveaux sympathisants.

2. L'image du candidat : nombre de Français élisent aujourd'hui celui ou celle (plutôt celui...) qui, au-delà d'incarner un socle de valeurs dans lequel ils se retrouvent en partie, possède la meilleure prestance, la plus belle éloquence et le charisme qui sied à la fonction suprême.

Sur la question du socle idéologique, François Bayrou offre à mon sens de sérieuses garanties. Rapidement et pèle-mêle (et sans être évidemment exhaustif) :
  • une vision raisonnable et raisonnée de l'écologie (qui ne se résumerait pas à une batterie d'interdictions qui mènerait à un ralentissement de l'économie);
  •  l'humanisme au coeur du projet de société;
  • une confiance dans la force de l'Europe à condition que celle-ci soit forte et n'impose pas tout aux Nations;
  • le retour à l'équilibre budgétaire (F. Bayrou est aujourd'hui le seul candidat à proposer cette mesure qui me parait pourtant d'une évidence folle);
  • un projet visant à prendre le meilleur du keynésianisme et le meilleur du capitalisme pour forger une "Troisième voie" à la française qu'est le centrisme; 
  • un projet dont les trois piliers sont à la fois raisonnables et nécessaires : 
    • Produire : de nouveau, en France; 
    • Instruire : l'instruction et l'éducation sont essentiels pour l'avenir de notre société;
    • Construire : ensemble, en remettant à l'honneur la responsabilité du citoyen.

Son socle de valeurs est, à mon sens, une grande force car un grand nombre de Français de différents bords peuvent s'y retrouver. D'ailleurs, je suis satisfait de voir que des politiciens de gauche (en particulier des écologistes et des progressistes) comme de droite (surtout de l'aile la plus modérée de l'UMP et les séguinistes) se sont joint à Mr. Bayrou.

A présent, penchons-nous un instant sur l'image du candidat et c'est là, vous allez le comprendre, que pêche pour moi la stratégie du MoDem. François Bayrou possède, à la base, un grand nombre d'élément dans son "pedigree" constituant une grande force pour séduire les Français :
  • C'est un provincial, un vrai, du Béarn, et il le revendique. C'est une force et on l'a vu lors de chaque élection (l'origine très "Neuilly-sur-Seine" de Nicolas Sarkozy a pesé sur son image tandis que les VGE, Chirac, Mitterrand etc. ont toujours communiqué sur leurs origines régionales);
  • Il vient du peuple : ce n'est pas un fils de diplomate ou de politicien mais un enfant de paysans qui a lui même exercé le métier d'agriculteur à la mort de son père;
  • Il connaît le pouvoir et ses couloirs : conseiller général, député puis ministre, ce n'est pas un novice et s'il est toujours en vie politiquement c'est qu'il a une certaine influence et une vraie force;
  • Il se présente pour la troisième fois : c'est ce qu'on appelle de la persévérance et de la détermination. Mieux, regardons ses scores à travers le temps : 2002 - 6,84 % , 2007 - 18,57 %.
D'ailleurs, il se positionne aujourd'hui comme le candidat préféré des Français, tout simplement, avec pas moins de 70% de bonne intentions... mais pourquoi les intentions de vote ne suivent-elles pas ?

Beaucoup lui reprochent, et moi le premier, son manque de charisme. Un côté un peu mou, pas très assuré devant micros et caméras, montrant les stigmates du bégaiement dont il souffrait enfant.
Sauf que cela cache une forte personnalité et un esprit brillant.
Dommage.
Deux solutions à mon sens :

1. Comme je le proposais avec sarcasme sur Twitter, changer l'image que véhicule François Bayou :



François Hollande y est arrivé en quelques mois, à grand renfort de relooking et de mediatraining. Sauf qu'aujourd'hui, il a une vraie stature de Président, ce qui n'était pas le cas il y a encore 1 an :


Le costume fade et sans style à fait place à le port du costume version Président : noir + chemise bien blanche + cravate bleue foncée avec reflets.

De son côté, cela ne semble pas atteindre François Bayrou... :


Revoir également l'apparence qui entoure le candidat. Toute la campagne qui a été mise en place sur le web est brillante, mais malheureusement le reste souffre d'un manque de cohérence avec cette campagne. Par exemple, comment est-ce que l'équipe de communication de la campagne de Bayrou peut imaginer cela... :


...quand celle de François Hollande a voulu cela :


Veuillez, sil vous plaît, observer :
  • d'un côté, le fond version PowerPoint 95 turquoise (je répète : turquoise ???) avec un slogan qui n'en est pas un (puisque le slogan de Bayrou est "Un pays uni, rien ne lui résiste") en Arial-tout-en-majuscule (so PPT 98 !) avec le faux-souligné-version-forme-automatique. Et évidemment, le costume trop grand.
  • d'un autre, un candidat déjà Président visuellement : costume ajusté, fond bleu France et à gauche de Hollande les drapeaux européen et français, tout comme un Président en exercice... Mais au-delà de cette signification, c'est tout simplement élégant.
Et pourtant, parfois, on n'est pas loin... :



Tout ceci ne doit évidemment pas masquer un véritable travail sur l'attitude du candidat Bayrou : plus assuré, plus combatif, plus tranchant dans ses interventions.

2. Au contraire, assumer cette autre dimension, mais alors l'assumer pleinement. Car j'ai remarqué en visionnant quelques vidéos que François Bayrou est beaucoup plus à l'aise lorsqu'il prend la parole dans un cadre plus informel : surgissent d'un coup humour, sincérité et fluidité dans le discours. On sent l'homme qui parle avec ses conviction et son expérience. 
Exemple :


Mais pour l'assumer, pas question de faire de l'entre-deux. Car c'est bien là le problème de François Bayrou à mon sens : il se force, du coup il est le cul entre deux chaises. Il se force à être plus grandiloquent, à prendre un air plus solennel, à avoir l'air fort... alors qu'il n'est jamais plus fort que lorsqu'il est lui. A condition qu'il s'assume.

2 commentaires:

  1. 2 choses :
    -1 : les images choisies parlent, néanmoins l'utilisation des drapeaux est contestable de la part d'une personne non-élue (en tout cas pas président, même si on pourra dire qu'il est élu à une autre fonction, ce qui me semble être un détournement de fonction, se servir de l'une pour postuler à l'autre) et Bayrou possède une image plus complexe, plus dynamique et moins naphtalinisée que ce qui semble se dégager des exemples choisis ici.

    -2 : Dans le choix d'évoquer "les deux raisons" qui empêchent l'accès au second tour, vous vous privez d'analyser les raisons externes au candidat, et faite comme si seul l'interne comptait. En l'occurrence, je pense que le fait que le candidat Bayrou n'ai pas été président est surtout dû à l'existence d'un candidat UMP et d'un candidat PS, un de chaque bord donc, dans un système bipartiste, dans une élection à deux tours, plus qu'aux qualités et défauts intrinsèques du candidat du Modem. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y aurait rien à corriger.

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  2. Merci Fañch, je suis tout-à-fait d'accord avec les deux parties de votre commentaire. Concernant la seconde partie, j'en suis parfaitement conscient et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai précisé "majeur ne signifie pas unique"... Ce que Bayrou appelle judicieusement la "Sarkhollandisation" de la campagne et son traitement par les médias ne lui donne qu'une trop petite fenêtre de communication.

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